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La consommation d’alcool au sein des entreprises

Date de publication : 13.07.14

droit social

L'alcool en entreprise

Stanislas Dublineau

L’alcool est-il proscrit dans l’entreprise ? Vers un encadrement des « pots » de départ ou autres fêtes dans l’entreprise

Le nouveau décret du 1er juillet 2014 réglemente une pratique courante et tolérée jusqu’à aujourd’hui : la consommation de boissons alcoolisées sur le lieu de travail (vin, bière, cidre et poiré). 

Un décret clarifiant la jurisprudence : une simplification de l’état du droit 

La consommation d’alcool lors de « pots au bureau » pourrait devenir un motif de licenciement si l’entreprise a fait le choix (justifié) de la proscrire dans son règlement intérieur.

L’arrêt du Conseil d’Etat sur l’affaire Caterpillar (CE, 12 nov. 2012, n° 349365 : JurisData n° 2012-025821) annonçait déjà les prémices d’une réglementation concernant la consommation d’alcool au sein des entreprises. La société en cause avait inséré dans son règlement interne l’interdiction formelle de consommer de l’alcool aussi bien aux cafétérias de l’entreprise que lors de manifestations telles « les pots de départs » ; l’arrêt du 12 novembre 2012 avait ainsi tranché la question de savoir si un règlement intérieur pouvait être plus restrictif que la loi tolérant certaines pratiques usuelles et conventionnelles.

Une interdiction générale et absolue dépassait largement les exigences de l’article R. 4228-20 du Code du travail préconisant qu’aucune boisson alcoolisée autre que le vin, la bière, le cidre et le poiré ne serait autorisée sur le lieu de travail. Pourtant l’employeur est tenu de prendre « les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs » selon la rédaction de l’article L. 4121-1 du même code. Pour autant, la société en question a été condamnée en raison du caractère trop général et absolu de son règlement intérieur au motif que ce dernier constituait une restriction aux libertés individuelles et collectives ; le Conseil d’Etat a toutefois retenu qu’il était possible de restreindre dans le règlement intérieur la consommation d’alcool si l’entreprise justifiait d’un  « impératif de sécurité » lié aux conditions de travail notamment et d’« éléments caractérisant l’existence d’une situation particulière de danger ou de risque ».

Le nouveau décret n° 2014-754 du 1er juillet 2014 modifiant l’article R. 4228-20 du code du travail publié le 3 juillet 2014 au journal officiel vient confirmer cette position et rétablir une certaine cohérence entre la jurisprudence de la Cour de Cassation et celle du Conseil d’Etat. En effet, les entreprises pourront désormais interdire par le biais de leur règlement intérieur ou par une note de service la consommation d’alcool sur le lieu de travail.

Une interdiction relative et conditionnée : pas d’application générale !

Ce décret ne pose pas une interdiction générale et absolue mais offre seulement la possibilité pour les employeurs d’encadrer ses pratiques courantes pouvant mettre en danger les travailleurs.

Ainsi celui-ci conditionne la possibilité d’interdire les boissons alcoolisées « lorsque la consommation de boissons alcoolisées » est « susceptible de porter atteinte à la sécurité et la santé physique et mentale des travailleurs ». Il s’agit davantage de restriction que de prohibition généralisée au monde de l’entreprise qu’elle soit par ailleurs privée ou publique,  car le décret précise que « l’interdiction doit être proportionnée au but recherché » Par ce décret, le législateur donne les moyens aux employeurs d’assumer leurs obligations de sécurité en « matière de prévention de la santé et de la sécurité des travailleurs et ainsi de prévenir tout risque d’accident ».

Ce décret ne met donc pas fin aux « pots de départ avec alcool » mais il donne la possibilité aux entreprises dont la sécurité de leurs travailleurs est en jeu, de limiter et voire même d’interdire l’alcool au travail. 

Cette nouvelle réglementation s’inscrit dans la logique des politiques publiques de sensibilisation et de lutte contre les substances psychoactives et renforce ainsi la responsabilité civile et pénale des employeurs.

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