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Bilan des remises en cause des aides COVID par l’URSSAF : les droits des cotisants n’ont pas été respectés dans le cadre de la procédure de vérification des déclarations

Date de publication : 16.01.25

COVID-19 . droit social

aides covid urssaf

Pierre-Jacques Castanet Céline Pagny-Clairacq

Des aides COVID massives au bénéfice des entreprises …

Pour rappel, pendant la crise sanitaire liée à la Covid-19 (2020-2021), l’État français a mis en place des mesures de soutien exceptionnelles pour aider les entreprises à traverser cette période difficile. Parmi ces aides, des exonérations ou reports de cotisations sociales ont été proposés par l’URSSAF pour alléger la charge financière des employeurs et des travailleurs indépendants ayant notamment une activité relevant des secteurs fortement impactés par la crise sanitaire.

Puis des remises en cause tout aussi massives de ces aides par l’URSSAF

Courant 2023 à l’arrivée de la prescription triennale des cotisations 2020, l’URSSAF, via la procédure de vérification opérée sur les DSN, introduite en 2019 à l’article L 133-5-3-1 du code de sécurité sociale, a remis en cause ces aides, de manière massive et sans respect du principe du contradictoire, au motif principalement, sans analyser l’activité réelle du cotisant, que son code NAF/APE n’appartenait pas à un secteur d’activité éligible aux aides.

Mais des remises en cause sur la base d’une procédure nouvelle non encore en vigueur …

Cette procédure de vérification des DSN qui a été établie en faveur de l’URSSAF, est plus rapide et plus simple que la procédure du contrôle URSSAF, puisqu’elle consiste uniquement à vérifier l’exhaustivité, la conformité et la cohérence des données déclarées.

Toutefois, l’applicabilité de cette nouvelle procédure était subordonnée à la parution d’un décret en Conseil d’Etat. Ce dernier devait déterminer les conditions et modalités d’application de cette procédure de vérification sur les DSN et notamment la procédure d’échange contradictoire préalable avec le cotisant.

Ce décret n’est paru que le 29 décembre 2023 (Décret n° 2023-1384).

Quand l’impatience de l’URSSAF se heurte aux droits des cotisants

Tant que ce décret ne paraissait pas, il appartenait à l’URSSAF de respecter les formalités édictées à l’ancien article R 243-43-4 du code de la sécurité sociale qui listait, pour conférer à la procédure un caractère contradictoire, les informations à communiquer au cotisant lorsque la procédure de vérification des déclarations débouchait sur un redressement.

Or, afin d’éviter de se voir opposer la prescription triennale et finalement faisant preuve d’une imprudente impatience, l’URSSAF a engagé des remises en cause des aides mais sans respecter cette seule et exclusive procédure applicable, qui garantissait le principe essentiel du contradictoire.

En effet le courrier de notification adressé au cotisant pour l’informer de son inéligibilité aux mesures exceptionnelles, a été établi à partir d’une trame commune qui ne disposait pas de toutes les mentions obligatoires pour permettre au déclarant de faire valoir ses droits pour se défendre (tel que l’indication du mode de calcul du montant du redressement, l’indication de la faculté de se faire assister d’un conseil, l’indication du droit pour l’organisme d’engager la mise en recouvrement en l’absence de réponse, l’obligation pour l’organisme de confirmer sa position en cas d’observations du cotisant dans les 30 jours)

En outre, cette notification était systématiquement déposée sur le compte URSSAF du cotisant, sans pouvoir donner date certaine à sa réception par ce dernier.

La machine semblait pourtant bien huilée :

  • notification d’inéligibilité aux mesures exceptionnelles sur le compte URSSAF du cotisant
  • notification d’une mise en demeure plusieurs mois après
  • notification d’une contrainte par un commissaire de justice, sans attendre parfois l’expiration du délai de deux mois pour permettre au cotisant de saisir la commission de recours amiable afin de contester le bien-fondé de la mise en demeure,
  • exécution de la contrainte par le commissaire de justice, sans opposition du cotisant dans les 15 jours suivants sa notification.

Les conséquences ne se sont pas fait attendre :

Les contentieux ont explosé, motivés aussi bien sur le fond, l’activité du cotisant faisant bien partie des secteurs éligibles aux aides Covid, que sur la forme, en raison du non-respect du contradictoire.

Depuis 2024, les mises en demeure sont systématiquement annulées dans le cadre du contentieux sur les remises en cause des aides Covid, dès que l’argument du non-respect du contradictoire, visé à l’article R 243-43-4 du CSS, est soulevé par le cotisant.

Certes une nouvelle procédure désormais s’applique depuis le 1er janvier 2024 mais …

Depuis le 01 janvier 2024 le décret visé ci-dessus a mis en place une nouvelle procédure de vérification et de correction par l’URSSAF des DSN codifiée aux articles R 133-14-2 et suivants du code de la sécurité sociale au lieu et place de l’article R 243-43-4 du code de sécurité sociale abrogé.

On peut imaginer que cette nouvelle procédure sera suivie à la lettre par l’URSSAF pour éviter la même déconvenue mais il est trop tôt à la date de parution de cet article pour le vérifier.

Alors un seul maître mot : maintenir notre vigilance sur le respect des procédures par l’URSSAF d’autant que ces nouvelles dispositions sont malheureusement en retrait s’agissant des droits et garanties des cotisants par rapport à l’article R 243-43-4.

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