Hôtels et restaurants : sauver son activité grâce aux procédures adaptées
Date de publication : 07.05.20
Anne Epinat Christopher Boinet
Les hôtels et restaurants sont gravement affectés par la crise sanitaire. Trésorerie et fonds de roulement sont à sec. Des procédures comme le mandat ad hoc, la sauvegarde ou le redressement judiciaire existent et peuvent permettre de surmonter la crise actuelle.
L’économie du tourisme (7 % du PIB) et les hôteliers-restaurateurs sont très gravement affectés par la crise sanitaire. Trésorerie et besoin en fonds de roulement sont au centre des préoccupations. Des recours que sont le mandat ad hoc, la procédure de sauvegarde ou la procédure de redressement judiciaire, existent et sont là pour venir en aide. Celles-ci ont fait leurs preuves dans le passé et elles peuvent encore vous sauver aujourd’hui, en complément des dispositifs d’aides gouvernementales mis en place. Les professionnels ont jugé ces dispositifs mis en place par l’Etat insuffisants.
Quels sont les avantages du recours au mandat ad hoc ?
Le recours à la procédure du mandat ad hoc est tout à fait adapté aux circonstances pour accompagner les hôteliers ou restaurateurs dans la phase de déconfinement :
- elle est confidentielle ;
- elle s’adresse à tous les hôteliers ou restaurateurs, éligibles ou non au fonds de solidarité ;
- elle est simple et rapide à mettre en œuvre et peut être actuellement engagée devant le Président du Tribunal de Commerce, par voie dématérialisée et répond à la notion d’urgence ;
- elle peut être engagée quand l’hôtelier ou le restaurateur n’est pas en état de cessation des paiements, ce qui est le cas pour la plupart des établissements à ce jour qui avaient des réserves pour tenir à court terme mais qui ne sauront tenir davantage ;
- elle est adaptée, car le mandat ad hoc est un outil sur-mesure qui permet une négociation avec tous les créanciers ou certains d’entre eux (notamment les principaux : banques, fournisseurs clés, bailleur, loueur en location-gérance, franchiseur) et obtenir le gel des créances, pendant la durée des négociations de 3 à 6 mois, puis un échelonnement sur un délai adapté aux capacités de remboursement du débiteur ;
- elle est efficace car le mandataire ad hoc suspend l’exigibilité des dettes et les poursuites mettant le professionnel à l’abri de toute action en paiement ou résolution des contrats ;
- le mandat ad hoc est apprécié par les créanciers comme un élément de garantie de sérieux et de crédibilité de l’analyse de la situation économique du débiteur et des propositions d’apurement du passif.
Le mandat ad hoc est souvent complété par une période de conciliation qui permet aux investisseurs de bénéficier du privilège de conciliation et au débiteur des délais imposés par le Président du Tribunal en cas de refus d’accord :
- l’avantage pour le débiteur est l’obtention de liquidités nécessaires pour faire face à la conjoncture défavorable, s’il trouve un investisseur pour l’accompagner ;
- en contrepartie de l’apport en trésorerie nécessaire en vue d’assurer la poursuite d’activité de l’hôtelier ou du restaurateur, le prêteur bénéficie d’un privilège sur tous les autres créanciers au moment du remboursement des sommes dues.
Quels sont les inconvénients et nos recommandations ?
- La procédure de mandat ad hoc doit être lancée le plus tôt possible pour maximiser ses effets sur le long terme ;
- à un moment crucial pour l’hôtelier-restaurateur, on imagine mal celui-ci confier ses intérêts à des conseils généralistes et non à des spécialistes des CHR. Le choix de l’avocat et du mandataire ad hoc s’avère donc primordial. Le recours à des professionnels aguerris et familiers du secteur s’impose, sinon où est la valeur ajoutée de leurs services pour faire face à cette crise inédite ;
- le professionnel est invité à négocier et à signer une convention d’honoraires avec le mandataire ad hoc et le conseil en amont de la procédure. Ces honoraires peuvent être au temps passé ou au forfait et comporter un honoraire complémentaire de succès.
Quels sont les avantages de la procédure de sauvegarde ?
De nombreux hôteliers ou restaurateurs s’interrogent sur la possibilité d’engager aujourd’hui une procédure de sauvegarde.
Pour qu’une procédure de sauvegarde soit ouverte, le professionnel ne doit pas être en état de cessation des paiements : il doit donc anticiper et ne pas attendre le dernier moment, au risque alors d’être considéré comme étant en état de cessation des paiements et de n’avoir d’autre choix que le redressement judiciaire ou subir une liquidation judiciaire.
Pour les hôteliers-restaurateurs qui ne seraient pas en état de cessation des paiements à l’issue du confinement, la procédure de sauvegarde peut offrir de multiples atouts :
- la sauvegarde gèle automatiquement le passif antérieur à la date d’ouverture de la procédure et interdit donc tout paiement des dettes antérieures ;
- la sauvegarde permet la suspension des poursuites des cautions personnes physiques pendant la période d’observation et la durée du plan de sauvegarde ;
- la sauvegarde permet la remise automatique des pénalités et majorations de retard ;
- la sauvegarde permet la remise d’une partie du principal des dettes publiques après saisine de la CCSF, excepté la TVA, si l’on obtient des remises de dettes privées ;
- le remboursement du passif et de toute dette est imposé par le Tribunal dans le cadre d’un plan de sauvegarde qui s’impose à tous les créanciers sur 10 ans.
La procédure de sauvegarde offre donc des avantages d’automaticité du gel des dettes, ce que le mandat ad hoc ne permet pas dans la mesure où cette procédure repose uniquement sur les négociations entre le mandataire ad hoc et les créanciers.
NB : Le professionnel avec une cessation des paiements avérée dans le cadre d’une situation économique particulièrement obérée, n’aura d’autre choix que de privilégier le redressement judiciaire, lequel comporte tous les avantages de la procédure de sauvegarde auquel s’ajoutent deux avantages considérables :
- L’avance par l’AGS des salaires impayés avant l’ouverture du Redressement Judiciaire.
- L’avance par l’AGS de toutes les indemnités de rupture des contrats de travail au cours de la période de Redressement Judiciaire.
Quels sont les inconvénients des procédures de sauvegarde et de redressement judiciaire ?
- Ces procédures ne sont pas confidentielles ;
- Le dirigeant est assisté d’un Administrateur Judiciaire.
En résumé
Le choix de la procédure la mieux adaptée relève de conseils d’avocats spécialistes dans le secteur hôtelier, dans la mesure où la procédure doit être choisie en fonction de la situation économique et financière de l’établissement et de ses perspectives :
- poursuite d’activité avec ses moyens propres,
- poursuite d’activité avec entrée d’un investisseur au capital,
- poursuite d’activité en vue de la cession,
- poursuite d’activité précédée d’une restructuration.
Cet article a également été publié dans l’Hôtellerie-Restauration
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